« La prévalence du syndrome d’hyperémèse cannabinoïde a augmenté du tiers avec la légalisation du cannabis au Canada en 2018 », explique Christopher Andrews, un gastroentérologue de l’Université de Calgary qui a fait le point sur la question il y a un an dans la revue Alimentary Pharmacology & Therapeutics. « Au début de la pandémie, il y a eu une forte augmentation, avec une prévalence deux fois plus importante qu’avant la légalisation. »
Ce syndrome se caractérise par des vomissements incontrôlables qui amènent les patients aux urgences. « On voit de plus en plus ça depuis une dizaine d’années », confirme Martin Laliberté, urgentologue et toxicologue au Centre universitaire de santé McGill (CUSM). « Ce sont des patients difficiles à suivre. Après leur départ des urgences, souvent on n’entend plus parler d’eux. »
Comment une substance associée aux fringales peut-elle susciter de telles nausées ? « C’est un dérèglement du système endocannabinoïde dû à une forte consommation de cannabis avec une haute concentration de THC », explique la sommité mondiale de ce syndrome, la gastroentérologue Thangam Venkatesan, de l’Université d’État de l’Ohio.
La Dre Venkatesan, qui suit 1600 patients présentant ou ayant présenté ce syndrome aux États-Unis, au Canada et en Inde, a découvert que cette forte consommation rend le système endocannabinoïde plus vulnérable au stress.
« C’est un système qui aide à la réponse aux stresseurs, dit-elle. Le cannabis l’active, ce qui diminue la réponse au stress. Mais si on consomme trop de cannabis avec un fort taux de THC, les récepteurs du système endocannabinoïde deviennent moins nombreux, parce qu’ils sont surstimulés par le cannabis. Alors on devient paradoxalement plus vulnérable au stress. Parfois, simplement se lever le matin devient trop stressant et on se met à avoir des vomissements incontrôlables. »
La chaleur peut amenuiser les symptômes du syndrome d’hyperémèse cannabinoïde. « Les gens peuvent prendre jusqu’à 10 ou 15 douches chaudes par jour », dit la Dre Venkatesan.
Bien que certains antipsychotiques pourraient potentiellement aussi amenuiser les symptômes, la seule solution est d’arrêter le cannabis pour permettre aux récepteurs du système endocannabinoïde de se remettre de la surstimulation, selon le Dr Andrews.
« Après six mois d’abstinence, normalement le nombre de récepteurs du système revient à la normale, dit le Dr Andrews. Il y a des études sur des molécules qui pourraient stimuler les récepteurs pour aider à contrôler le vomissement, sans entraver la réactivation des récepteurs pendant l’abstinence. »
Il commence à y avoir des ressources pour aider les fumeurs réguliers de cannabis à arrêter, comme pour l’alcool et les autres drogues, rapporte Didier Jutras-Aswad, psychiatre au CHUM.
Hérédité
Il existe aussi un syndrome d’hyperémèse non cannabinoïde, moins fréquent, selon la Dre Venkatesan. « Une bonne partie des cas sont pédiatriques et liés à l’hérédité, dit-elle. Ça semble lié à des antécédents familiaux de migraine. »
Source : De mystérieux vomissements liés au cannabis : https://www.lapresse.ca/actualites/sciences/2024-02-05/de-mysterieux-vomissements-lies-au-cannabis.php#
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